Même lorsqu’on est ou a été un grand voire immense acteur, cela n’empêche pas l’auto dérision, qui peut en revanche parfois tirer jusqu’à la caricature, même sympathique. Comme Al Pacino, à l’affiche de “Manglehorn” cette semaine.

Ils sont, dans des registres très différents, de grands acteurs, dont le talent n’est plus à prouver depuis bien longtemps. Ils ont aussi embrassé dans leurs carrières des rôles puissants, sinon cultes, qu’ils ont contribué à rendre inoubliables grâce à leur jeu d’acteur. Au point parfois qu’ils sont devenus des caricatures d’eux-mêmes : tics en tous genres, air ahuri ou visage grimaçant resservis jusqu’à plus soif au gré des films…Voici quelques exemples.

Al Pacino

Formé par Charles Laughton, un des plus grands comédiens de théâtre, puis à l’Actors studio par Lee Strasberg qui deviendra son mentor, Al Pacino est l’un des plus grands acteurs du cinéma américain et du cinéma tout court, ayant incarné des personnages entrés depuis longtemps dans la légende du 7e art. Formé à “la méthode” propre à l’Actors Studio, Pacino est connu pour délivrer un jeu très intense et physique. Son approche, qui lui a permis de se glisser dans la peau de quelques uns des plus grands rôles de l’histoire du cinéma américain -en tête celui de Michael Corleone bien entendu- a fait de lui un idéal qui a inspiré – et inspire encore- toute une génération d’apprentis acteurs et réalisateurs.

Reconnu aujourd’hui pour son fabuleux don de faire oublier l’acteur caché derrière un personnage, il est aussi parfois devenu, au gré de films médiocres et de choix de rôles faciles sinon malheureux, un peu une caricature de lui-même; du moins une caricature des rôles qui ont fait sa renommée. On en veut pour preuve la collection de Thrillers policiers emballés dans les années 2000 tels les Two for the Money, La recrue, 88 Minutes, La Loi et l’ordre… Où l’acteur nous ressert plus ou moins un ersatz de son surpuissant personnage dans le Heat de Michael Mann. Et on ne parle même pas de son cabotinage dans le catastrophique Amours troubles… Quoi qu’il en soit, Kevin Spacey adore se payer -gentiment- sa tête : Al Pacino fait en effet partie de quelques unes de ses meilleures imitations.

Robert De Niro

Formé lui aussi à l’Actors Studio, Robert De Niro est aussi à juste titre considéré comme un des plus grands acteurs de sa génération et du cinéma américain. Acteur de composition épousant totalement le profil de ses rôles, c’est aussi un très grand perfectionniste. Il n’hésite pas à apprendre le saxophone pour la comédie musicale New York, New York, à vivre aux côtés de mineurs-sidérurgistes pour Voyage au bout de l’enfer (1978), à prendre trente kilos pour jouer un boxeur sur le déclin dans Raging Bull (1980), performance qui lui vaut l’Oscar du Meilleur acteur, ou encore à apprendre la messe en latin pour les besoins de Sanglantes confessions. Avec une aussi fabuleuse carrière, il n’a depuis longtemps plus rien à prouver.

Si certains ironisent sur le fait que le dernier (très) grand rôle de Bob remonte au fabuleux Casino de son ami Scorsese voilà 20 ans, force est de constater qu’il cachetonne depuis le début des années 2000 dans des comédies grand public, où il recycle les mêmes expressions de visage fermé / énervé (la trilogie de Mon beau-père et moi notamment). Ou encore la caricature faite dans Mafia Blues et sa suite des rôles qui firent sa gloire chez Scorsese. Un jeu tout aussi caricatural et grimaçant dans les plus récents Panique à Hollywood  ou Everybody’s Fine.

On garde peut-être le moment le plus embarassant pour la fin : cette auto citation / imitation de sa cultissime réplique “You’re talkin’ to me ?” de Taxi Driver, atrocement recyclée dans les consternantes Aventures de Rocky et Bullwinkle, en 2000. Le summum de la caricature.

 

Louis de Funès

Inutile de vous (re)présenter Louis de Funès, icône absolue du cinéma populaire de la France Gaullienne restant un des acteurs préférés des français. Ses films cultes comme la Folie des grandeurs, Le Corniaud ou La Grande Vadrouille, pourtant multi rediffusés à la TV, sont régulièrement des cartons d’audiences.

Débutant au cinéma en 1945 à l’âge tardif de 31 ans, l’acteur ne connaîtra pourtant la consécration qu’en 1964, à 50 ans, avec le premier volet de la saga du Gendarme de Saint Tropez. Les cinq suites, les trois Fantômas, les quatre films avec Oury mettent De Funès au sommet du box-office pour un bon moment. Le public raffole de ses grimaces de son visage élastique, de ses mimiques et de sa gestuelle. De ses débuts difficiles et de cette percée tardive, Louis De Funès va cependant garder une grande inquiétude du lendemain. Cela le poussera à ne prendre qu’un minimum de risques. En clair : de Funès qui fait du De Funès, comme une caricature de lui-même. Qu’importe au fond : le public n’en demandait pas davantage.

Samuel L. Jackson

Samuel L. Jackson ou lorsque la coolitude de ses personnages se confond avec l’acteur, au point d’en arriver parfois à la caricature. Que l’on soit clair, histoire de rassurer d’éventuels esprits chagrins : il n’est bien entendu pas question ici de réduire le talent de l’acteur à ce seul trait, physique ou moral. Il n’empêche. Surnommé à juste titre Mr Cool ou, mieux, King of Cool, c’est surtout son ami Tarantino qui va le hisser au rang de personnage cool ultime, sous les traits du tueur citant la Bible Jules Winnfield. “Pourquoi les personnages sont-ils si cool chez Q.T. ?” se demandaient en 2012 deux journalistes américains de l’excellent site IndiWire, Peter Labuza et Matt Zoller Seitz. Il posaient leur réflexion ainsi : “Tarantino fait deux choses : d’abord, il fait apparaitre ses personnages comme sortant de l’ordinaire avant même qu’on les voie à l’écran. Il nous prépare à leur coolitude. Ensuite, ses personnages énoncent eux-mêmes la mythologie de leur propre coolitude. Le film crée alors un conflit, lorsque les personnages doivent se confronter à leur propre mythologie”. “On va faire comme trois petits Fonzie. Il est comment Fonzie ?” lance-t-il à Amanda Plummer dans Pulp Fiction. “Il est…cool ?”“Il est cool, exactement”.

 

Cool attitude à tous les étages chez l’acteur donc. Cela passe bien entendu aussi par le look. Même lorsqu’il est accoutré avec un mauvais goût absolu comme dans l’excellent et très sous-estimé Au revoir, à jamais (mocassins à gland, pantalon cigarette patchwork Burberry et casquette). Il y a des serpents dans l’avion ? Aucun problème, il peut gérer, même s’il fait savoir qu’il commence à être énervé en balançant une punchline devenue culte dont il a le secret : “I have had it with these motherfucking snakes on this motherfucking plane !”

Ci-dessous, une excellente scène d’Au Revoir, à jamais, dans lequel Jackson incarne le pas très réglo Détective Mitchell ‘Mitch’ Henessey, accompagnant une Geena Davis amnésique devenue une espionne – tueuse implacable…

 

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