De notre envoyé spécial à Tokyo,
On est allés le chercher par le col de la zone mixte, alors que les Bleus avaient encore la tête dans les nuages après cette finale incroyable contre la Russie. Kevin Tillie n’a dû rentrer que deux fois pour servir, il n’a pas joué beaucoup plus le reste du temps, mais le fils du sélectionneur était aussi ému pour lui que pour Laurent Tillie, qui va quitter ses fonctions sur la plus belle des récompenses, après neuf ans à la barre. Il a confié son émotion à 20 Minutes.
Ça fait quoi d’avoir cette médaille autour du cou ?
Elle est très très lourde, on ne s’y attend pas, elle est énorme. C’est fou, on n’arrive pas encore à réaliser. C’est clair qu’une fois qu’on a mené deux manches à rien, ils ont commencé à bien jouer. Souvent le tie-break dans ce cas-là, tu le perds. Mais ce groupe il pousse, il pousse, on donne tout, quoi qu’il arrive. Mon père a dit avant qu’on allait mourir sur le terrain… On essaie de survivre depuis le début, on a tout donné pour gagner.
Click Here: samoa rugby shirtsCette victoire à l’arraché, elle vous ressemble, finalement non ?
C’est ce qu’on s’est dit aussi à deux sets partout quand on s’est regroupé avant le tie-break. « C’est rien, les gars ce sera encore plus beau comme ça ». On a fait exprès. C’est mieux de gagner comme ça même si ça aurait pu être plus tranquille. Le premier set, on était mal embarqués tout le long. Il y a eu un challenge pour nous et j’ai dit au groupe que c’était le moment qui allait changer le match. Bon, après ils égalisent à deux sets partout, on peut dire que c’est un autre tournant. Pouvoir renverser ce tie-break pour gagner, c’est complètement dingue.
Ça fait quoi de voir son père et son coach s’en aller sur un accomplissement aussi incroyable ?
Ça fait neuf ans qu’il bosse dur, je ne sais pas comment il a fait pour tenir ce groupe-là aussi longtemps, parce qu’on est insupportables (rires). C’est tellement inespéré de finir là-dessus. Je l’avais vu en 2016 quand le joueur brésilien Bruno avait gagné avec son père à Rio, je me suis dit ce serait un truc de fou de le faire un jour. Et voilà, on l’a fait. C’est un truc que tu imagines, pouvoir le réaliser c’est dingue, surtout qu’avec un groupe de potes. On rigole du matin jusqu’au soir. On déconne tout le temps, même quand on perd !
Vous avez eu un moment à deux pour partager ça entre père et fils ?
Non pas vraiment, mais on se voit souvent (sourire). Il y a des petites tapes, on se le dit sans le dire. Il était stressé tout du long, ce n’est pas simple.
C’est un soulagement qu’il s’en aille, entre nous ?
Ça fait neuf ans. Depuis qu’il est mon coach, c’est plus trop un père. Là ça va me faire du bien de rentrer avec un papa qui ne va pas m’emmerder avec le volley (rires). Et s’il me dit quelque chose, je lui répondrai que je suis champion olympique. Je suis soulagé qu’il arrête, c’est vraiment dur, même si ce sont des émotions de fou.
Vous allez enfin pouvoir l’appeler papa, du coup ?
Oui ! Pendant les entraînements je l’ai dit une fois cet été je crois sans faire exprès, les autres étaient morts de rire. Mais normalement je ne le dis pas, je ne l’appelle même pas. Je ne lui dis même pas « coach », ce serait encore plus bizarre et les autres seraient encore plus morts de rire. En fait je ne l’appelle jamais, je ne l’écoute jamais, je ne lui parle jamais. C’est peut-être pour ça que je ne joue pas.