L’équipe de France de volley dispute ce lundi à Ostrava un 8e de finale de championnat d’Europe contre la République tchèque.Les Bleus continuent sur la lancée d’une épopée déjà mythique à Tokyo, conclue sur un sacre olympique.Acteur majeur de cette aventure, le réceptionneur-attaquant Trévor Clévenot espère que cette médaille d’or ouvre une nouvelle ère pour un sport jusque-là sous-médiatisé en France.

On ne les arrête plus. A peine plus d’un mois après le triomphe olympique à Tokyo, les coéquipiers de Trévor Clévenot partent grands favoris ce lundi en 8es de finale de l’Euro face à la République tchèque, chez elle à Ostrava. Le réceptionneur-attaquant de 27 ans et la Team Yavbou ont enchaîné cinq victoires en cinq matchs de poule. Ils surfent sur une vague qui pourrait enfin permettre au volley français de sortir du relatif anonymat dans lequel il végète depuis toujours.

Clévenot balaie l’actualité d’un sport qui a changé de dimension par la grâce d’une sublime finale face aux Russes (3-2), devant 6,7 millions de téléspectateurs.

Enchaîner aussi rapidement JO et Euro, il n’y a que dans le volley que l’on voit ça, non ?

Je pense… Mais la situation est un peu particulière car les JO ont été reportés d’un an à cause du Covid. Normalement, il n’y aurait dû avoir cette année que les championnats d’Europe et auparavant la World League, rebaptisée VNL (Ligue des nations). C’est exceptionnel, mais c’est vrai que ça enchaîne.

Est-ce dur de s’y remettre après le sacre olympique ?

Oui forcément, d’autant que nous avons été au bout des JO. Nous avons réalisé quelque chose d’exceptionnel. Dans la tête, se remettre à travailler, c’est toujours compliqué. Mais on s’est bien remobilisés dans l’ensemble.

Avez-vous eu le temps de couper entre les deux compétitions ?

Oui, je suis rentré dans ma famille. On avait quand même eu trois mois de bulle sanitaire pour préparer les Jeux et ne pas penser au volley pendant une dizaine de jours a fait du bien.

Sentez-vous que le regard des adversaires a changé ?

Oui, tout le monde a envie de taper les champions olympiques en titre ! Il faut rester dans notre costume d’outsider : il y a des nations plus armées que nous pour cet Euro, comme la Pologne qui coorganise, les Russes toujours présents, les Serbes et les Slovènes, deux grosses équipes européennes qui n’ont pas participé aux JO et ont eu du temps pour se préparer. Physiquement et psychologiquement, ils sont davantage prêts. On reste sereins et on va essayer de faire quelque chose de bien, mais il faut être lucide.

En parlant de lucidité, êtes-vous redescendus de votre nuage olympique ?

De temps en temps, on s’envoie des petites piques, on en reparle. Mais on essaie d’être quand même focus sur cet Euro pour finir en beauté. Il faut basculer, c’est un autre tournoi, une autre compétition, un autre format, d’autres équipes. On a eu la chance de vivre un truc de fou avec les JO. Mais là, la tête est à 100 % à l’Euro.

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Est-ce que vous avez revu cette fameuse finale face aux Russes ?

Non. Je n’ai même encore jamais revu un match des Jeux. Je voulais profiter du moment présent avec ma famille et mes amis proches, pas me replonger dans quelque chose de passé. Plus tard, je la regarderai, ce sera un bon moyen de me faire un peu plaisir.

Avez-vous pu profiter de ces JO, même à huis clos ?

C’était particulier. On ne s’est pas rendu compte de l’impact qu’il y a eu en France. On l’a vu quand on est arrivés à Paris, ça nous a fait super plaisir. C’est juste dommage de ne pas avoir pu partager sur le moment avec les supporteurs, de pouvoir sortir avec eux.

Quand on voit les images du lendemain du titre, on se dit que vous avez quand même bien fêté cette médaille d’or, non ?

(Sourire) C’est sûr ! Cela faisait trois mois qu’on était enfermés et on a réussi à aller jusqu’au bout. Le corps et l’esprit avaient besoin de couper. On en a profité.

L’équipe n’a pas trop changé depuis Tokyo, mais vous avez un nouvel entraîneur. Comment est-il ?

Laurent (Tillie, qui était en poste depuis 2012) est resté beaucoup de temps à la tête de l’équipe de France. Notre coach brésilien (Bernardinho) nous apporte un nouveau discours, une nouvelle manière de voir le volley, de jouer. Cela nous a aussi motivés pour cet Euro. Tout de suite, on a une nouvelle pression, un nouveau staff, c’est très bien.

Vu la concurrence, conserver le titre dans trois ans à Paris sera très compliqué, à votre avis ?

C’est sûr. Confirmer quelque chose d’exceptionnel, c’est encore plus dur. On sera encore plus attendus. Il n’y a eu que deux équipes dans l’histoire du volley aux JO qui ont réussi à gagner deux fois de suite (l’URSS en 1964 et 1968, les Etats-Unis en 1984 et 1988). Si on arrive à le faire, ce sera plus qu’exceptionnel. L’objectif, c’est Paris 2024 mais le chemin est extrêmement compliqué, on le sait.

Le volley était jusqu’à présent le parent pauvre des grands sports collectifs en France. Cette médaille d’or peut-elle changer les choses ?

On l’espère. Il y a eu de belles audiences. On espère que ça va pousser les jeunes à se mettre au volley, que ça incitera les gens à aller voir les matchs de pros qui sont de qualité en France. C’est quand même un sport vachement sympa à jouer et à regarder.

Est-ce qu’on vous a reconnu dans la rue à votre retour en France ?

Oui, un peu en rentrant du Japon. Il y a eu du monde devant la télé et forcément cela a eu un impact. Mais petit à petit, ça s’est « dégradé » et c’est normal.

Y a-t-il eu un effet JO sur vos réseaux sociaux ?

Oui, il y a eu un gros d’impact, en France et à l’étranger. J’ai gagné à peu près 45.000 abonnés sur Instagram pendant la période des Jeux (il en compte 70.900).

Vous êtes fils d’international de volley, vos deux frères pratiquent ce sport. Il y a beaucoup d’enfants de la balle en équipe de France…

Complètement. Depuis longtemps, on est un peu entre « fils de » (les autres champions olympiques Ngapeth, Tillie, Patry, Grebennikov, Louati ainsi que Faure, absent aux Jeux mais présent à l’Euro). Avant c’était un sport très familial. Puis peu à peu, avec les résultats, on espère que ça aille de l’avant, que ça s’ouvre.

Comment avez-vous débuté à votre tour le volley ? A l’école, comme tout le monde ?

J’ai toujours joué sur la plage, chez moi (à Royan). Auparavant, j’avais fait du foot. J’étais défenseur au centre de formation de Nantes puis de Bordeaux. J’ai vécu une année un peu moins bien aux Girondins, et j’ai changé vers 13-14 ans, pour pratiquer le volley en club.

Comme la grande majorité des champions olympiques, vous évoluez à l’étranger (après Toulouse puis Plaisance et Milan en Italie, Clevenot doit rejoindre Jastrzebski Wegiel en Pologne). Pourquoi ?

Oui, 70 % de l’équipe joue à l’étranger. C’est normal par rapport au budget des clubs, au niveau. A l’étranger, notamment en Pologne ou en Italie, les salles sont blindées. Il y a 3.000, 4.000, 5.000 personnes qui viennent, même pour les petits matchs. On espère que le championnat français va doucement monter pour venir équilibrer tout ça.

Peut-être que les JO vont inciter les Français à se déplacer ?

On l’espère. Le championnat français est loin d’être mauvais, il y a vraiment un bon niveau. Ce serait bien que les gens qui ont aimé regarder nos matchs à la télé viennent découvrir le volley en vrai.

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