La musique pour Waxx c’est le « liant de toute sa vie ». Plus jeune, il écoutait « beaucoup de rap » bercé par les guitares et la folk qu’écoutaient ses parents. Jusqu’à ce qu’un de ses cousins lui fasse écouter Smells Like Teen Spirit de Nirvana : « J’avais l’impression que ça me parlait directement, que ça alliait la rage du rap avec des guitares hyper efficaces, Il y a eu un truc magique que je ne peux pas expliquer. C’est un peu comme toutes les premières fois qu’on veut retrouver derrière », se rappelle-t-il. Basse, guitare, batterie… Waxx apprend tout, seul, en jouant dans des groupes, « Dans ma vie, j’ai deux passions, la musique et le basket. Le basket, je savais que je ne pouvais pas en faire ma vie parce que je n’étais pas assez bon, mais aussi parce que je n’ai pas l’esprit de compétition. Moi, j’aime jouer avec les gens, je n’aime pas jouer contre. La musique c’est parfait parce qu’on joue ensemble, pour les gens. C’est ce qui me correspondait le mieux et j’avais trouvé le puits sans fond ».
Ce « coup de foudre » fondateur, Waxx nous le raconte entouré de ses instruments, dans le studio de la banlieue sud de Paris, où il enregistre depuis 2019 son émission Fanzine. De Hoshi à Oxmo Puccino en passant par Chilla, LEJ ou Youssoupha, tous les styles, tous les talents, toutes les générations s’y succèdent pour performer mais aussi raconter la musique qui les a faits. « Un Fanzine, c’est quelque chose de passionné pour les passionnés faits par des passionnés », résume Waxx avec la même douceur et bienveillance qu’il accorde à ses invités. Entretien passionné avec un « fanatique de musique ».
La reprise des concerts debout, c’est une nouvelle qui vous réjouit ?
Je suis un peu comme tout le monde : on navigue à vue, on a tous les radars brouillés. Moi, je crois que ce que je vois, donc j’espère que c’est safe pour les gens. C’est la santé avant tout. Mais évidemment, je suis hyper heureux si on peut avoir un semblant de vie qui revient comme avant. Ce n’est pas par pur altruisme, mais je me rappelle que quand j’avais 17-18 ans, des événements comme la Fête de la musique étaient hyper importants pour moi. On a déjà supprimé une grosse année de culture pour les jeunes. Et je pense surtout à eux, j’espère qu’ils vont pouvoir jouir des mêmes plaisirs que nous à leur âge. J’espère que tout va bien se passer rapidement pour eux surtout. Ce sont des années importantes quand tu es jeune.
Les concerts reprennent mais en réalité depuis le premier confinement, vous n’avez jamais cessé de jouer notamment sur vos réseaux sociaux…
Avec ma femme, on a vite compris en voyant ce qui se passait en Italie qu’on allait être confinés beaucoup plus longtemps que ce qui était annoncé et on s’est demandé comment on allait faire dans notre appartement pour se supporter, pour supporter cette nouvelle vie alors qu’on avait jusque-là chacun de grosses activités. Alors on s’est donné chacun une rigueur. Je me suis dit : « j’ai plein d’anecdotes sur la musique, je vais faire des stories où je vais raconter des histoires que je trouve extraordinaires dans la musique aux gens et à chaque fois, je vais le faire autour de riffs de guitare ». Très vite je me suis retrouvé avec plus de 80 demandes d’artistes que j’adore, à faire des duos improbables avec Young Blood, Shaggy, que j’écoutais quand j’étais ado ou Gérard Darmon…. On a accompagné plein de gens et tous les jours j’apprenais un nouveau morceau. Franchement, ça m’a vraiment aidé.
De la reprise de Nirvana avec Juliette la violoncelliste de LEJ à celle de Wejdene avec Julien Doré. Les covers WTF c’est un peu votre marque de fabrique ?
Oui, je pense qu’il n’y a pas de limite. Pour moi, les bonnes chansons peuvent se faire de toutes les manières possibles, à peu près avec n’importe qui et plus le décalage est abyssal et plus on se rend compte qu’en fait, il n’y a vraiment aucune frontière dans la musique. Pour moi c’est quelque chose d’hyper important. On oublie trop souvent de dire que les Beatles ont été un groupe de reprises avant d’être un groupe de composition. Que Elvis et Johnny Cash ont commencé par des reprises. Que la plupart des artistes commencent par des reprises. On grandit avec l’idée que l’accomplissement d’une carrière est de faire ses propres chansons. Je ne suis pas sûr. Je pense qu’il y a plein de carrières différentes et je pense qu’une bonne chanson reste une bonne chanson, peu importe par qui elle est reprise. J’ai fait un album de reprises de Sinatra alors que je ne l’avais jamais écouté de ma vie avec Ben l’Oncle Soul. On a été signé sur Blue Note qui est quand même je crois le label le plus classe au monde. Et ça a été une aventure folle : je me suis plongé dans l’univers Sinatra. J’ai lu du Sinatra, j’ai écouté tout ce qui était possible et imaginable de Sinatra et découvert que lui aussi faisait plein de reprises incroyables. La reprise est un exercice qui existera toujours dans l’histoire de la musique. Je trouve que c’est un des trucs les plus beaux parce que c’est le lien entre tout le monde.
Après votre émission « Le Comité des reprises » sur Canal+, vous avez lancé en 2019 avec le producteur C.Cole l’émission musicale « Fanzine » sur votre chaîne YouTube. Comment est né ce projet ?
J’ai fait beaucoup de promotion dans ma vie pour mes propres projets et pour les projets des autres et j’ai toujours eu l’impression qu’il y avait un boulevard désertique pour les artistes pour s’exprimer musicalement. On invite souvent les artistes pour réagir à l’actualité, pour parler de leur dernier album ou même pour leur demander s’ils disent « le Wi-Fi ou la Wi-Fi. » Ça ne me dérange pas du tout, c’est très divertissant, mais disons que moi qui suis vraiment un fanatique de musique, j’ai de plus en plus de mal à trouver un endroit dans lequel les artistes peuvent s’exprimer sur leur musique et sur la musique qui les a faits. Et j’avais l’impression que les artistes performaient rarement. En France, à part Taratata, Quotidien ou C à vous, il y a peu d’émissions pour performer et donc peu d’élus.
Au lieu de dire que ça manque, avec mon ami le producteur C.Cole on s’est dit « créons-le ». Et on a créé notre rêve qui était de voir des artistes venir chanter les chansons qui ont fait ce qu’ils sont devenus et qui ont changé leur vie. C’est un vrai lieu dans lequel on peut créer, faire de la musique ensemble tout en restant divertissant. Mais c’est la musique le plus important. C’était notre pari et je pense que ce n’était pas que dans notre tête car tous les artistes qui viennent sont ravis d’être venus et surpartagent le truc.
Vous jouez mais vous parlez aussi beaucoup sur la vingtaine de minutes d’un épisode ?
Au début, on parlait assez peu parce que j’avais l’impression d’être un imposteur : je ne sais pas interviewer, je ne suis pas journaliste, alors que j’ai des discussions hyper longues avec tous les artistes qui viennent ici pour faire des morceaux ou des albums. Je me disais pourtant que j’aimerais bien podcaster ces moments de reprise et de discussions entre artistes. J’adore le poscast Featuring de Driver car c’est un artiste qui parle à d’autres artistes et donc ils se comprennent et arrivent à briser une glace qui est difficilement brisable entre un média et un artiste. Quand il pose une question qui peut être un peu dérangeante, l’artiste ne voit pas ça comme un piège parce qu’il parle à quelqu’un qui lui-même a vécu ces travers-là, il y a un respect mutuel. Je trouve que c’est intéressant.
Est-ce que vous vous voyez maintenant comme un youtubeur ?
Non, pas du tout. Je n’ai aucun problème à ce qu’on me voit comme ça mais je me sens plus musicien. En fait, je pense que youtubeur est un mot qui n’existe pas vraiment, c’est un peu « boomer » comme expression. A un moment donné, on n’a pas su expliquer comment de jeunes gens pouvaient gagner de l’argent sur une plateforme et donc on les a étiquetés du nom de la plateforme dans laquelle ils étaient. En réalité, on s’en est juste servi pour faire relativement la même chose que ce qui se fait partout mais avec des créations qui, pour moi, sont du jamais vu en terme de liberté.
Click Here: mens f1 polo,classic f1 shirtsBeaucoup de jeunes artistes participent à votre émission : jouez-vous un rôle de tremplin ?
Il n’y a pas un avant et un après, je n’aurais pas cette prétention-là, mais disons qu’il y a une validation pour certains artistes qui viennent ici parce que ceux qui suivent Fanzine forment une communauté de gens vraiment mélomanes qui vont ensuite la plupart du temps adhérer à l’artiste. Un Fanzine, c’est quelque chose de passionné pour les passionnés faits par des passionnés. Et donc, on invite des gens passionnés et passionnants. Et je pense que du coup, effectivement, les épisodes se regardent, se reregardent. Mais je pense que ça n’a pas d’influence sur leur carrière du tout, c’est plutôt nous que ça s’enchante !
Vous avez aussi reçu beaucoup de jeunes femmes comme Hoshi, Pomme, Chilla,… Avez-vous le sentiment qu’il se passe quelque chose de positif pour ces musiciennes actuellement ?
Je suis un homme blanc donc je ne peux pas me mettre à leur place, mais de ce que je vois et de ce que j’entends. il y a quand même du mieux mais je pense qu’on n’en est encore qu’au début. Moi, j’ai toujours été persuadé qu’il y avait un talent énorme chez les femmes dans la musique. Je suis le plus grand fan au monde de Feist et de Fiona Apple et j’ai toujours été choqué par le manque de visibilité et plus encore de « legacy » qu’on leur donne dans la musique. Quand Rolling Stones Magazine fait le top 500 des albums, la première femme arrive en vingt-cinquième position. Je suis scandalisé ! Vraiment, c’est fou. Il y a plein de guitaristes féminines qui sont incroyables et ça dépasse le niveau technique et pourtant, on les invisibilise tellement, notamment dans les magazines de guitare américains où il n’y a que des hommes. Je ne dirais pas que c’est mon combat parce que c’est leur combat. Mais si je pouvais ne travailler quasiment qu’avec des femmes, je le ferais parce que je me sens mieux avec elles, je me sens plus moi-même et parce que je trouve qu’elles ont un talent qui me touche plus. C’est con de “genrer” mais voilà, j’ai la chance d’être entouré de femmes formidables et, elles dégagent une émotion qui me touche beaucoup plus que n’importe qui !
Ça se voit dans votre programmation….
Je fais très attention à ça. Quand on a créé ce média avec Chris, je ne voulais pas que ça soit une émission où on invite une typologie de personnes. J’aimerais qu’on invite vraiment le monde entier dans cette émission, que tout le monde puisse s’y retrouver et que nous, surtout, on puisse se nourrir de ça. De Eddy de Preto à Hoshi à Youssoufa, à Médine, Pomme. Tout le monde a quelque chose de singulier, d’unique à raconter. Et je pense que ça serait dommage de s’affranchir de ça et d’inviter très facilement les gens qu’on a déjà vus depuis 40 ans. Et moi, j’en ai soupé.
Avez-vous d’autres projets d’album ou d’émission ?
A partir de septembre, je vais animer une émission hebdo sur RTL 2 qui va s’appeler Foudre et dans laquelle je vais inviter les artistes à parler de leur foudre musicale. Et avec C.Cole (avec qui je fais tout !), on travaille sur un projet d’album rock où on n’invite que des personnes qui sont « rock’n’roll » à nos yeux. Le « rock » est un style de musique mais le « rock’n’roll » est une attitude. Il y a beaucoup de personnages dans l’histoire de la musique qui ont été très “rock’n’roll” sans l’être. Diam’s, par exemple, pour moi était rock’n’roll, comme Bob Marley qui jouait du Reggae. Et donc sur cet album on invite plein de rappeurs. Il devrait sortir en fin d’année ou début 2022 car on prend vraiment du temps. On fait comme mon album solo Fantôme : c’est de l’artisanat, on polit longuement chaque chanson car on veut pouvoir les réécouter dans 15 ans et se dire que ça n’a pas vieilli.